L'AUBERGE ROUGE
24 OCTOBRE 1951
1833, à Peyrebeille, un petit village perdu dans les solitudes venteuses du plateau ardéchois. Pierre et Marie Martin, un couple d'aubergistes, assassinent en toute tranquillité leurs clients pour mieux les voler. Par un soir d'hiver glacé, alors que les taverniers viennent précisément de commettre l'un de leurs abominables forfaits, les voyageurs d'une diligence attardée descendent dans l'établissement, en même temps qu'un moine accompagné d'un novice. La recette promet d'être substantielle, et Martin s'en frotte les mains. Mais Marie, prise d'un soudain scrupule mystique, renonce à tuer l'homme de Dieu et lui confesse ses crimes - pas moins de 103. Horrifié, le moine tente de sauver ses compagnons, sans pour autant trahir le secret de la confession...
ANALYSE ET BOX OFFICE
Fernandel alterne le bon et surtout le moins bon en ce début des années 50. Il vient de réaliser "Adhémar" lorsque Claude-Autant-Lara, sans doute un des plus grand de l'histoire du cinéma français lui propose de jouer dans "L'auberge rouge". Le réalisateur qui a connu le triomphe en 1947 avec "Le diable au corps" puis réalisé la meilleur adaptation de Feydeau avec "occupe toi d'Amélie" concocte son film avec son équipe habituelle de grand talent. Jean Aurenche et Pierre Bost au scénario mais aussi son équipe technique attitré. Au niveau de la distribution Fernandel va partager l'affiche avec de nombreux acteurs talentueux dont la brillante Françoise Rosay peut être la meilleure actrice de sa génération mais aussi Carette l'acteur fétiche du réalisateur. Le tournage est préparé avec minutie car le réalisateur apprécie d'avoir le découpage de son film bien en amont du film. Même si des scènes seront tournées en Savoie, l'essentiel du film se tourne en studio dans un décor mis au point par Max Douy.
Claude Autant-Lara le sait très bien, Fernandel non bridé est capable du pire cabotinage de la terre. Redoutable professionnel il connait très bien la technique et sait repérer si la caméra est fixée sur lui ou sur d'autres acteurs. Non avare de conseils il est capable de déborder n'importe lequel des réalisateurs qui se transforme plus en "yes man" qu'autre chose. Mais le réalisateur comptent bien canaliser le trépidant acteur afin de ne pas avoir un comique troupier ou autre bidasse comme acteur. L'astuce consiste a "épuiser" Fernandel en lui faisant jouer plusieurs prises pour chaque scène ce qui énerve considérablement l'acteur habitué à tourner généralement en une prise ou deux. Il est donc totalement sous le joug du réalisateur et cela l'agace prodigieusement. Au final Fernandel aura bien des mots avec le réalisateur qu'il quittera sur un bras d'honneur et il ne parlera jamais du film dans les années suivantes.
Qu'importe. Claude-autant-Lara réalise une comédie noire exemplaire. Nous suivons donc le moine tenter désespérément de sauver par tous les moyens les voyageurs que le hasard a fait pousser la porte de cette auberge occupée par les tueurs en série de la pire espèce. Rien ne sera épargné au Moine qui verra même son novice compter fleurette avec la fille du couple de tueurs de voyageurs. Remarquablement dirigés, les acteurs livrent un numéro de haute voltige. Fernandel lorsqu'il est bien dirigé est capable du meilleur et assurément, c'est bien le cas. Il alterne tous les états possible passant de la gouaille joyeuse à la pire épouvante en un claquement de doigt. Oui Fernandel est drôle, très drôle même et sans en faire trop. Le film est noir certes puisqu'il se termine dans le malheur en définitive mais qu'il est drôle, voire comique à certains moments. Il faut parfois être deux pour réussir une scène d'anthologie et Françoise Rosay livre une de ses prestations dont elle a le secret. Le clou du film est bien sûr la célèbre scène de la confession où le moine pressé de passer à table prend quelques minutes pour confesser Marie (!) grille à marrons à la main. Somnolant presque, le Moine sombre dans la terreur au fur et à mesure qu'il comprend dans quel enfer il a mis les pieds.
Autant-Lara a réalisé une formidable comédie et a sorti le meilleur de ses comédiens. Ce très grand classique du cinéma mondial a pourtant connu des critiques mitigées sans doute l'avis négatif de Fernandel peu habitué à être secoué par un réalisateur y a beaucoup joué. Le film sort en exclusivité à Paris en octobre 1951 dans 4 salles dont "Le Balzac" et "La Scala" une très belle salle de 1000 places située dans le Xème arrondissement de Paris. Le film récolte 150 000 spectateurs mais c'est dans les salles de continuation et surtout les salles de quartier que le film va attirer environ 800 000 spectateurs sur les salles de paris et de sa banlieue. Au final le film va attirer plus de 2.6 millions de spectateurs en France ce qui va donner naissance à une légende que le film n'a pas très bien marché. Sur tous les nombreux films sortis en France en 1951 plus d'une centaine ont attiré plus d'un million de spectateurs. Avec 2.6 millions de spectateurs le film se classe à la 14ème place annuelle, ce qui est remarquable pour un film noir qui est tout sauf familial.
Le film est devenu un classique du cinéma dont on ne se lasse pas. Et pourtant il a failli coûter très cher à Fernandel. Lorsqu'il est sollicité par des producteurs italiens pour incarner "Don Camillo" il commence par refuser le rôle de peur d'être catalogué comme "acteur à soutane". L'acteur ne le sait pas mais il est à deux doigts de rater le rôle de sa vie.
Un triste remake est sorti en 2007 interprété par l'équipe du "Splendid" qu'on aura connu bien plus inspirés. Le défi était trop grand.
CATÉGORIE | RANG | ENTRÉES | SALLES |
ENTREES FRANCE | 14 | 2 662 369 |
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ENTREES PARIS BANLIEUE | 800 000 |
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1ère semaine | 31 200 |
4 | |
2ème semaine | 42 136 |
4 | |
Cote du succès | * * * |