L'AVENTURE C'EST L'AVENTURE
4 MAI 1972
À Paris, en 1972, la vie n'est pas drôle pour les truands. Si les banques sont toujours faciles à piller, l'argent ne s'y trouve plus. Trois compères, Lino, Jacques, Simon – respectivement myope, sourd et bègue – et leurs acolytes Charlot et Aldo décident en désespoir de cause de se recycler dans l'action politique.
Après avoir réussi une première opération dans le show-business, ils louent leurs services à Juarez, révolutionnaire sud-américain qui les charge de séquestrer un ambassadeur. Comme le guérillero refuse de les payer, ils l'enlèvent et le proposent à trois partis opposés. Ils récupèrent ainsi une petite fortune qu'ils augmentent par un détournement d'avion.
Ils prennent des vacances peu discrètes aux Caraïbes, où Juarez les fait arrêter. Après avoir subi toutes sortes de tortures fantaisistes, ils avouent à Juarez le numéro de leur compte en banque en Suisse.
Juarez les livre à la Police française : c'est le procès du siècle. L'avocat présente ses clients comme des révolutionnaires convaincus; l'affaire devient politique et le gouvernement, pour éviter une émeute, organise l'évasion des compères, qui se retrouvent en Afrique. Là, ils refusent de prendre le pouvoir avec le dictateur local, préférant enlever le Pape et gagner la fabuleuse rançon qui serait versée par les catholiques du monde entier.
Il est difficile d'évoquer un film comme "L'aventure c'est l'aventure" car celui-ci est certainement le film le plus populaire de Claude LELOUCH dans le cœur des français. Il est devenu un film culte, tout simplement.
Le réalisateur, scénariste, producteur enchaîne les films avec plus ou moins de succès. "Smic smac smoc" film "expérimental" a succédé avec moins de succès que le "Voyou" avec Jean-Louis TRINTIGNANT. "Le voyou" un de ses meilleurs films décrivait un truand charismatique qui organise l'enlèvement d'un enfant sans violence avec la complicité de son propre père. "Smic Smac Smoc" est un film sur la contestation. Fidèle à son habitude d'explorer des thèmes déjà abordés "L'aventure c'est l'aventure" est un mix des films précédents. Citons Claude LELOUCH: « Au moment où j’ai fait L'aventure c'est l'aventure, les affrontements idéologiques étaient à leur apogée. Mai 1968 avait réduit le fossé entre le patron et les ouvriers. Jamais la France n’avait été aussi politisée. Je voulais filmer cette confusion qui, au fond, me faisait rire. Je voulais montrer à quel point les intellos mélangent tout. Ils sont séduits par n’importe quel discours si l’orateur a du charisme. J’avais envie de faire intervenir des voyous qui n’ont rien à cirer de rien, mais qui se servent de la politique pour faire de l’argent. »
Etant donné que le réalisateur laisse une part importante à l'improvisation le choix du casting sera déterminant. Lino VENTURA tourne pour la première fois avec le réalisateur. Pour l'acteur la période est mi figue-mi raisin. Ses deux derniers films ont obtenus des résultats mitigés. "Fantasia chez les ploucs" a fait 1.4 millions d'entrées et "Boulevard du Rhum" 1.2 millions d'entrées. GAUMONT qui a perdu beaucoup d'argent avec ce dernier et a du serrer les budgets de ses films suivants et a du attendre le succès de "Il était une fois un flic" pour se refaire une santé financière. Ce n'est donc pas un bon point pour Lino VENTURA qui espère peut être avec LELOUCH retrouver un bon succès au box office. Le réalisateur désire retrouver son compère Jean-Louis TRINTIGNANT mais ce dernier ne semble pas avoir apprécié le thème du film, c'est fort dommage tant l'association entre les deux stars aurait pu être formidable à l'écran. C'est donc Jacques BREL qui remplace TRINTIGNANT. Le désormais acteur n'a plus grand chose à prouver à l'écran et possède déjà quelques beaux succès au box office dont "Mon oncle Benjamin" et "Les risques du métier".
Le très grand Charles DENNER est également de la partie et devient un membre de la famille LELOUCH tout comme Charles GERARD vu dans les deux films précédents de l'auteur. Plus surprenant, la présence d'Aldo MACCIONE au casting. Assez peu connu à l'époque, il faisait partie d'un groupe burlesque italien, "Les Brutos" que l'on pourrait comparer aux "Charlots". On a pu le remarquer dans un petit rôle dans "Le voyou". Le choix s'avèrera déterminant. Au niveau féminin, Nicole COURCEL fait aune apparition courte, mais remarquée. Notons des petits rôles pour les copains Yves ROBERT et Gérard SIRE, l'homme à la voix de velours et bien sûr une apparition de Johnny HALLYDAY dans son propre rôle.
Comme le montre le résumé du film, l'histoire est décousue et hautement improbable, c'est une farce menée par une bande de truands que l'on peut comparer aux célèbres "Pieds nickelés", célèbre série de bande dessinée populaire à l'époque.
La première partie du film décrit la rencontre entre les différends protagonistes du film. Ce sont tous des truands de petite envergure, dont la particularité est de s'appeler par le prénom des acteurs ce qui perturbe un peu au début. Jacques coince Charlot qui est un pompiste qui remplit à moitié le réservoir de ses clients. Aldo est un petit voleur de voiture qui provoque un accident et rencontre ainsi Lino. S'ensuit une grande discussion en italien entre les deux protagonistes avant l'arrestation de Lino.
Tous ensemble à Paris ils cherchent une manière de faire du business. Le propre fils de Lino lui tient des discours sur le fait que :"Le capital, c'est foutu. La Cinquième, c'est foutu. Le PC, c'est foutu. La société de consommation, c'est fini tout ça, c'est foutu. Les bagnoles c'est foutu".Goguenard, Lino lui pète sa voiture. Mais ce qui est drôle c'est que Lino répète ce discours à ses collègues le soir même et la bande décide de se lancer dans le business moderne. Premier coup, enlever Johnny HALLYDAY en personne. Décidément les enlèvements sont une obsession chez LELOUCH. Mais tout ce passe dans la bonne humeur avec un Johnny très copain avec ses ravisseurs et qui se paye un bon coup de pub. Beaucoup de dialogues sont bien sûr improvisés avec plus ou moins de bonheur. Avec LELOUCH il y a à boire et à manger mais l'ensemble est souvent agréable à suivre. L'entente entre les acteurs est flagrante. Aldo MACCIONE est souvent très drôle. Dans une scène qui évoque les bandes dessinées, la bande est capturée par le Che Guevara d'opérette avec qui ils ont fricoté. Les tortures se succèdent pour leur faire avouer leur numéro de compte en Suisse. Le pire est que les compères font des paris sur celui qui craquera le premier. La torture d'Aldo est de subir la morsure de gros insectes sur son service trois pièces. Alors qu'on pouvait craindre d'horribles douleurs celui-ci éclate d'un rire terriblement contagieux.
Evidemment le passage "légendaire" du film est la démonstration d'Aldo de son pas déhanché et classe sensé faire craquer toutes les femmes. Il forme ses partenaires à cette démarche et nous pouvons observer les cinq jouer les coqs sur la plage, y compris Lino qui n'hésite pas à se ridiculiser.
Embauchés pour une révolution Africaine, le groupe doit discuter avec le futur dictateur sur la date prévue de la révolution. Le lundi c'est pas possible, le mardi non plus...c'est assez sympa, surtout quand le dictateur déclare au groupe qu'ils doivent bien connaître les révolutions. Jacques répond que " de Marx, nous avons surtout retenu la notion de Capital". Le clou du film est assez énorme, nos amis n'hésitant pas à enlever Le Pape en personne. Comme le dit le génial Charles DENNER à la fin du film : "Le Pape, c'était bien le Pape, oui, très bien.".
L'ensemble est un peu inégal et parfois certaines choses tombent à plat, comme BREL improvisant son numéro belge dans l'avion, par exemple. Mais l'ensemble est fort joyeux. Comme d'habitude, LELOUCH mélange le passé et le présent dans un montage dont il a le secret. L'ensemble fleure bon les insouciantes 70's avec son générique "pop" et la musique primesautière de l'excellent et fidèle Francis LAI. Le point fort du film vient du fait qu'aucun des acteurs ne tente de tirer la couverture à lui, y compris VENTURA, ce qui assure une belle cohésion à l'ensemble.
Le film sort au moment du festival de cannes 72 où il est présenté hors compétition. Au box office il est en concurrence avec le premier film de Jean YANNE "Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil". A la surprise générale, le film de ce dernier explose le box office et prend la première place du box office hebdomadaire parisien devant le LELOUCH. ce dernier ne s'en laisse pas compter et remporte la première place la semaine suivante. Les deux films dominant le box office de la tête et des épaules. En France c'est le film de Lelouch qui prend largement la tête du box office durant trois semaines, puis reste un beau second derrière la comédie de Jean yanne. Les deux films se tirent la bourre et finalement le film de Jean YANNE l'emporte au fur et à mesure des semaines. Mais les deux films deviennent les champions de l'été 1972 où ils sont présent durant de nombreuses semaines dans le top 10. Au final le réalisateur obtient son plus gros succès avec près de 4 millions de spectateurs et est millionnaire sur Paris-Banlieue.
LELOUCH confirme qu'il est un des plus efficaces réalisateurs français. Lino VENTURA peut respirer, il est remonté au top du box office et sa carrière en profitera. Claude LELOUCH l'apprécie beaucoup et va rapidement lui proposer un nouveau projet en commun "La bonne année". Une grande amitié est née entre VENTURA et BREL et les deux désirent rejouer ensemble, ce qui sera le cas dès l'année suivante avec le fabuleux "L'emmerdeur". Charles GERARD va poursuivre son parcours avec LELOUCH. Charles DENNER est toujours très demandé et va tourner avec BELMONDO. La révélation du film Aldo MACCIONE va intégrer le casting de la comédie de Robert LAMOUREUX, "Mais où est donc passée la 7ème compagnie ?". Bref, le succès considérable du film a profité à tous.
En 2008 Claude LELOUCH a évoqué le projet de délivrer une séquelle au film avec les deux survivants du casting original, soit MACCIONE et GERARD.
Le succès du film ne s'est jamais démenti, surtout à la télévision où il est devenu un des habitués du petit écran.
CATEGORIE |
RANG |
NOMBRE |
SALLES |
ENTRÉES FRANCE |
8 |
3 815 477 |
|
1ère semaine |
1 |
257 243 |
|
2ème semaine |
1 |
473 040 |
|
3ème semaine |
1 |
319 710 |
|
4ème semaine |
2 |
221 007 |
|
5ème semaine |
2 |
179 279 |
|
6ème semaine |
2 |
157 006 |
|
7ème semaine |
2 |
118 275 |
|
8ème semaine |
2 |
107 493 |
|
ENTREES PARIS |
|
732 100 |
|
ENTREES BANLIEUE |
|
334 622 |
|
ENTREES PARIS BANLIEUE |
|
1 066 722 |
|
Détail entrées Paris |
|
|
|
1ère semaine |
2 |
107 974 |
14 |
2ème semaine |
1 |
134 977 |
|
3ème semaine |
2 |
95 389 |
|
4ème semaine |
2 |
63 561 |
|
5ème semaine |
3 |
56 688 |
|
6ème semaine |
3 |
43 129 |
|
7ème semaine |
3 |
37 075 |
|
8ème semaine |
4 |
40 006 |
|
9ème semaine |
4 |
41 084 |
|
10ème semaine |
2 |
32 800 |
|
Nombre de semaines Paris |
|
20 |
|
Moyenne salles Paris 1ère sem |
|
7 712 |
|
Cote du succès |
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* * * * * |
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