LES AVENTURES DE RABBI JACOB
18 OCTOBRE 1973
Porté par une foule d'amis en délire, Rabbi Jacob s'envole de New-York en direction de Paris, où il n'est pas revenu depuis 30 ans... Victor Pivert, P.D.G. de son état, colérique, raciste et xénophobe, s'apprête à marier sa fille. Tandis qu'il fonce au volant de sa voiture, avec son chauffeur Salomon (dont il réalise, avec une stupéfaction horrifiée qu'il est juif), c'est l'accident! Abandonné par Salomon qu'il a chassé dans sa fureur, Pivert trouve refuge dans une usine de chewing-gum et se trouve nez à nez avec des individus patibulaires commandés par un certain Farez, lesquels séquestrent - après l'avoir enlevé à Saint-Germain des Prés - un leader révolutionnaire de leur pays, Slimane. Celui-ci parvient à s'enfuir avec Pivert. Poursuivis par Madame Pivert, qui croit son mari en pleine escapade amoureuse, par le commissaire Andréani qui prend Pivert pour un criminel dangereux, et par Farez et ses hommes, Pivert et Slimane trouvent refuge à Orly, où ils "empruntent" la tenue vestimentaire d'un groupe de rabbins de New-York. Pris pour le rabbi Jacob, Pivert, accompagné de Slimane, est amené triomphalement dans un monde amical mais inconnu, où il va multiplier les gaffes, tandis que le vrai rabbi Jacob se voit arrêté par la police, enlevé par Farez, sans rien comprendre à son aventure. En fin de compte, Pivert arrivera à temps pour le mariage de sa fille, laquelle, plantant là son fiancé zozotant, choisira de s'envoler avec le beau Slimane nommé, entre temps, Président de la République de son pays, à la suite d'une révolution réussie...
En ce début des années 70, les choses ne sont peut être plus aussi évidentes pour Gérard OURY et Louis DE FUNES. Ils ne sont plus les rois. Oui, Claude ZIDI et ses "bidasses en folie" ont prouvé avec plus de 7 millions de spectateurs en 1971 qu'il était possible de faire tomber de leur piédestal les rois du rire. Je l'assume, Gérard OURY possède cette qualité rare de réaliser des films à chaque fois plus mauvais que le précédent. Un exploit rare dans le cinéma français, car il faut bien considérer que depuis "Le Corniaud", de loin son meilleur film, il n' a cessé de développer un cinéma fait de gags téléphonés et préparés de longue date avec minutie à l'aide de budgets énormes. A croire qu'il n'a jamais digéré son premier (et meilleur ) gag de la 2 CV de Bourvil dans " Le Corniaud". Claude ZIDI et ses Charlots dominent de façon outrageuse le box office avec leurs films pas très fin, à vrai dire, parfois drôle, concoctés à l'aide d'une bande d'acteur qui ne se prenaient pas au sérieux et de gags assez énormes. Le (jeune) public apprécié ces films assez médiocres. A Gérard OURY de prouver qu'il peut être aussi mauvais tout en dépensant plus, défi auquel il s'attache avec une remarquable attention. Etant donné qu'il ne peut se défaire de ses obsessions sur la seconde guerre mondiale, les allemands, etc..etc.. va concocter une variante assez stupéfiante de ses délires sous le couvert de décrire le comportement du français moyen. Evidemment il va choisir pour acteur son comparse le plus célèbre et qui l'a rendu riche.
Louis DE FUNES n'a peut être finalement plus tellement de choix que d'accepter le rôle de Victor PIVERT. Mis à part le grand succès de "La folie des grandeurs" et d'un "gendarme" pas vraiment indispensable, ses derniers films n'ont pas remporté de triomphes au box office. " Sur un arbre perché" "L'homme orchestre", "Jo" sont relativement passés inaperçus. Et la concurrence fait rage. Les Charlots et Claude ZIDI dominent le box office des comédies françaises de la tête et des épaules, un nouveau venu Pierre RICHARD a triomphé avec Jean ROCHEFORT dans "Le grand blond avec une chaussure noire", mais aussi Jean YANNE avec "Tout le monde il est beau..." qui a mené une dure bataille avec " L'aventure c'est l'aventure" de Claude LELOUCH. BELMONDO est toujours présent et Lino VENTURA prépare une comédie avec Jacques BREL. Bref, DE FUNES est-il toujours DE FUNES. La presse l'épingle, s'interroge : cet industriel du rire peut-il se sortir des recettes habituelles, c'est à dire tourner un nouveau gendarme et reprendre ses succès au théâtre. Car en 1972, DE FUNES est fatigué alors que la frontière de la soixantaine est passée. Il possède une grande propriété et doit poursuivre les projets rentables, ce qui angoisse tous les acteurs à succès. Il a repris "Oscar" au théâtre du Palais Royal qui triomphe bien sûr, et va même rajouter des dates à la rentrée 1972, ce qui le fatigue toujours autant. Il accepte donc la proposition de Gérard OURY pour tourner "Les aventures de Rabbi Jacob", un film qui possède 1500 gags (!!) et a demandé des mois de préparation.
Louis DE FUNES sera donc Victor PIVERT un industriel français un peu raciste sur les bords qui va être embarqué contre son gré dans une incroyable aventure. On le sait DE FUNES déborde d'une généreuse énergie durant les tournages. celle-ci déployée avec son génie permet à certains films d'une rare médiocrité d'échapper au néant du cinéma. cela tombe bien, ce "Rabbi Jacob" est exactement de cet acabit. Avec Jean GIRAULT, "yes man" favori de DE FUNES, l'acteur possède une très grande marge de manœuvre pour préparer ses gags, son travail. Avec Gérard OURY ce n'est pas la même histoire. L'acteur ne possède aucune marge de manœuvre tellement le réalisateur reste dans son carcan préparatoire et le tournage est épuisant. La pitoyable scène de l'usine à chewing gum prend un mois de tournage dans une usine de betteraves. L'acteur a froid et tourne de nombreuses scènes tard la nuit pour satisfaire OURY. L'acteur s'emploie physiquement dans la scène du tapis roulant de l'aéroport, ce qui le fatigue une nouvelle fois. Et puis bien sûr il y a la célèbre scène de la danse yiddish éprouvante et que l'acteur exécute avec un incroyable brio.
Résultat, DE FUNES a tout donné pour satisfaire un réalisateur exigeant avec sa vedette. Que reste-t-il du film ? Pas grand chose mis à part deux ou trois traits de génie de FUNES. Gérard OURY retombe dans ses travers. PIVERT endossera le costume de Rabbi Jacob pour vaincre ses préjugés racistes, au milieu d'une triste histoire de gangsters basanés, qui pourraient être vaguement issus du Moyen Orient, des arabes, quoi...passons, passons. Gérard OURY déploie des moyens considérables pour des gags éculés. Alors que dans un ZIDI les Charlots exécutent leurs gags presque à l'impro, chez OURY c'est long et cher. Passons les scènes déjà évoqués ainsi que les poursuites à moto dans le métro, le taxi portés par les rabbins, etc... et concentrons nous sur l'abattage très forcé de DE FUNES mai qui porte quelques beaux résultats. Il y a bien sûr le célèbre "Salomon est juif" mais aussi la scène d'arrestation sur l'autoroute et bien sûr la scène de la danse, cultissime. Certains jugeront si trois scènes font un film. Pas encore diminué l'acteur offre pour la dernière fois à son public un rôle sans retenue. Dire que le film tient sur ses épaules est un très très doux euphémisme.
Gérard OURY peut aussi compter sur une belle brochette d'acteurs confirmés, DALIO, Suzy DELAIR, Claude GIRAUD qui fait ce qu'il peut mais aussi une nouvelle génération d'acteurs : Henri GUYBET dans le rôle de Salomon qui va lui coller à la peau et dans des rôles très courts, Gérard DARMON et MIOU-MIOU, ainsi qu'une belle équipe technique comme Henri DECAE a la photo ou Vladimir COSMA à la musique qui va connaitre le même succès que "Le grand blond avec une chaussure noire".
Le film va être en grosse concurrence avec des poids lourds du box office : "L'emmerdeur" triomphe et " 2 hommes dans la ville" va sortie une semaine après "Rabbi Jacob". Le film bénéficie d'une forte promotion et sort à une très bonne date soit mi-octobre 1973 avec en ligne de mire les proches vacances scolaires. La première semaine parisiennes est massive avec 189 000 entrées sur 16 salles, soit plus que "Le grand bazar" avec Les Charlots ou "L'emmerdeur" sortis quelques semaines avant. Dès la deuxième semaine parisienne c'est le coup de tonnerre, le film réalise encore une fois 189 000 entrées, suivie par une troisième semaine à 188 000 entrées, un phénomène jamais vu à Paris. Le public suit et le bouche à oreille est fumeux. la presse s'en mêle et le "Film Français" souligne ces chiffres jamais vus auparavant. Soit plus de 550 000 entrées à Paris en trois semaines. Plus aucun doute n'est permis: DE FUNES est là et bien là, décidé à reprendre son trône. Les vacances scolaires permettent au film de consolider son box office qui va même largement profiter des vacances de fin d'année. Même si la presse n'a pas été tendre avec le film, le box office total Paris Banlieue sera souverain avec 2 millions de spectateurs, un score énorme et le film passe les 7 millions de spectateurs France. Louis DE FUNES est de nouveau le numéro un sans contestation possible. Quant à Gérard OURY il a largement atteint son objectif redevenir numéro un français du rire et dépasser Claude ZIDI sur tous les plans ce qui restait un challenge pas évident à réussir.
Le film cartonne en Espagne et même en Allemagne rendant la production du film fort rentable.
Gérard OURY ne peut se passer de sa star et va vite réfléchir à un nouveau projet avec lui quitte à ne trouver que le titre.
Louis DE FUNES est toujours fatigué. A l'été 1973 il répète la pièce "La valse des toréadors" qui l'épuise totalement. De fait la pièce triomphe en même temps que "Rabbi JACOB" mais DE FUNES doit l'interrompre à la 198ème représentation pour se reposer, il a tout donné encore une fois. La dernière a lieu le 25 avril 1974, on lui propose une autre pièce mais l'acteur refuse car il a promis a Gérard OURY d'être en forme pour le tournage du "Crocodile" dont la pré affiche et les dates de tournage ont été publiés dans "Le film français". Le film va sortie pour noël 1975 et s'annonce ambitieux. Encore une fois la condition physique de DE FUNES sera mise à l'épreuve. Mais a sept semaines du tournage, la nouvelle tombe, DE FUNES est foudroyé par un double infarctus. Le tournage est donc annulé. Très sérieusement diminué, quel sera l'avenir cinématographique de l'acteur ?
CATEGORIE |
RANG |
ENTREES |
SALLES |
ENTRÉES FRANCE |
|
7 295 727 |
|
1ère semaine |
1 |
557 289 |
|
2ème semaine |
1 |
738 295 |
|
3ème semaine |
1 |
873 022 |
|
4ème semaine |
1 |
478 867 |
|
5ème semaine |
1 |
392 861 |
|
6ème semaine |
1 |
355 980 |
|
7ème semaine |
1 |
241 361 |
|
8ème semaine |
2 |
222 931 |
|
9ème semaine |
6 |
130 509 |
|
ENTRÉES PARIS BANLIEUE |
|
2 028 282 |
|
1ère semaine |
1 |
189 436 |
16 |
2ème semaine |
1 |
189 244 |
|
3ème semaine |
1 |
188 973 |
|
4ème semaine |
1 |
123 262 |
|
5ème semaine |
1 |
115 287 |
|
6ème semaine |
1 |
95 411 |
|
7ème semaine |
2 |
73 599 |
|
8ème semaine |
4 |
72 820 |
|
9ème semaine |
7 |
45 361 |
|
Cote du succès |
|
* * * * * |
|
BANDE ANNONCE
LE TOURNAGE DU FILM
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