• LE DOULOS - BOX OFFICE JEAN-PIERRE MELVILLE 1963

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    LE DOULOS

     

    8 FEVRIER 1963 

     

     

     

     DOULOS

    Réalisation

    Jean-Pierre MELVILLE

    Scénario

    Jean-Pierre MELVILLE

    Photographie

    Nicolas HAYER

    Musique

    Paul MISRAKI

    Production

    Georges de BEAUREGARD
    Carlo PONTI

    Distribution

    LUX

    Tournage

    16/04/62 - 14/06/62

    Durée

    108 minutes

    Silien

    Jean Paul BELMONDO

    Maurice FAUGEL

    Serge REGGIANI

    Commissaire Clain

    Jean DESAILLY

    Nuttheccio

    Michel PICCOLI

    Fabienne

    Fabienne DALI

    Victoria

    Gabrièle DORZIAT

     

    Maurice Faugel, un truand d'un certain âge, rentre au pavillon de Gilbert Varnove, receleur de bijoux, lequel l'héberge après quatre ans passés en prison. Il lui emprunte un revolver, qu'il utilise pour le tuer. Il vole les bijoux et une grosse liasse de billets. Il s'enfuit juste quand arrivent chez Gilbert Nuttheccio et Armand, deux hommes du milieu qui venaient négocier les bijoux. Faugel enfouit l'argent, les bijoux, le revolver, au pied d'un lampadaire de terrain vague. Faugel, installé chez Thérèse, reçoit la visite de Silien, qui lui apporte du matériel de cambriolage. Thérèse, comme précédemment Gilbert, reproche à Faugel son amitié pour Silien, connu comme un notoire indicateur de police. Silien, dès qu'il a quitté Faugel, téléphone à l'inspecteur Salignari, sans que l'on sache ce qu'il lui dit. Faugel et Rémy partent pour leur cambriolage à Neuilly. Silien revient chez Thérèse, seule, et lui fait subir un passage à tabac qui lui permet d'obtenir l'adresse où "travaille" Faugel. Le casse de Neuilly tourne mal, Faugel et Rémy s'enfuient; Rémy est mortellement blessé, Faugel abat l'inspecteur Salignari, reçoit une balle dans l'épaule, et doit son salut à une voiture qui vient le recueillir. Chez Anita, Faugel est soigné par un docteur qui lui extrait la balle de l'épaule. Puis il part à la recherche de "cette ordure de Silien", persuadé que celui-ci l'a donné à Salignari. Dans les rues de Paris de nuit, le commissaire Clain et ses inspecteurs cherchent Silien. Ils le trouvent, puis l'interrogent longuement sur la mort de Salignari. Devant son refus, ils le font chanter et obtiennent qu'il les aide à trouver Faugel. Il apprend dans le journal la mort de Thérèse, sans doute supprimée par le milieu. Arrêté par Clain, qui le soupçonne pour le meurtre de Gilbert, il ne parle pas, et se voit incarcéré. Un homme déterre les bijoux, l'argent, le revolver, au pied du lampadaire. Silien se rend au Cotton-club, établissement propriété de Nuttheccio. Il s'attable avec Fabienne, son ancienne maîtresse et amie actuelle de Nuttheccio. Ils se fixent rendez-vous pour la soirée. Après qu'ils aient fait l'amour, Silien demande à Fabienne de témoigner que, de la voiture où elle était restée, elle a entendu un coup de feu lorsque Nuttheccio et Armand ont rendu visite à Gilbert. Elle, par amour pour Silien, accepte de dire à la police ce qu'il lui suggère. Silien, avec la complicité de Fabienne qui passe des appels au téléphone, fait venir Nuttheccio dans son bureau, puis Armand, les abat tour à tour, et organise une mise en scène de façon à faire croire qu'ils se sont entretués pour la possession des bijoux. Dans un bar, Faugel sorti de prison, et Jean, écoutent Silien leur raconter les événements : c'est Thérèse qui a donné Faugel à la police et Silien qui est venu le recueillir à Neuilly. Faugel n'en revient pas de l'amitié que lui porte Silien. En prison, quand il était persuadé de la trahison de Silien, Faugel avait commandité son meurtre à son collègue Kern; celui-ci annonce qu'il va livrer la commande. Faugel se précipite à Ponthierry, à la maison de campagne pour laquelle Silien a pris la route. Il arrive le premier et se fait abattre par Kern qui ne l'a pas reconnu. Silien descend Kern caché derrière un paravent, mais ce dernier a la force d'abattre Silien d'une balle dans le dos.

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    Ce qui peut être agréable de tenir un blog qui traite de la carrière des acteurs au box office c'est d'éviter d'établir une critique sur un film considéré comme un chef d'œuvre du genre. On peut émettre une critique mais on fera comme si celle-ci ne comptait pas, cachée sous un flot de statistiques. On évite de se mouiller, pour tout dire. Car le film en question est "Le Doulos" réalisé par le célébrissime Jean-Pierre MELVILLE. Il suffit d'aller sur le net pour constater que le film bénéficie d'un nombre impressionnant de sites ou de blogs lui tressant des louanges qui ne permettent pas réellement une critique qui va en l'encontre de la pensée dominante. Le nombre de revues traitant du film est également conséquent. Maintenant le film est il au niveau de sa réputation ?

    Pour faire court, car de nombreux détails fourmillent sur le net concernant la réalisation, Georges DE BEAUREGARD est celui qui a lancé la carrière de BELMONDO avec "A bout de souffle" et il aurait bien besoin d'un nouveau succès avec son célèbre poulain. Lors du tournage du film BELMONDO connait le succès avec "Cartouche" et c'est une chance pour le producteur qui profitera surement. Il contacte Jean-Pierre MELVILLE pour lancer la production d'un polar dans des délais courts. MELVILLE qui connait bien BELMONDO pour lui avoir fait tourner le fort beau "Léon Morin prêtre" et avait prévu de retourner avec lui un film "Les âmes du purgatoire" avec Anthony PERKINS. Mais devant la demande du producteur, il décide d'adapter un roman de Pierre LESOU "Le doulos" publié dans la célèbre collection "série noire" en 1957. Mais si MELVILLE conserve l'intrigue, il supprime totalement l'argot présent dans le livre pour réécrire des dialogues où ce langage est totalement absent. Il traduit l'argot en français châtié. Il conserve cependant le titre du livre "Le doulos" qui est le nom donné aux balances dans le milieu.

    Au niveau de la distribution, le rôle principal est donné à Jean-Paul BELMONDO qui partage l'affiche avec Serge REGGIANI qui désirait le rôle principal. Autant le dire tout de suite je n'apprécie pas spécialement Serge REGGIANI à l'écran, voire pas du tout. Pire, je trouve également que Jean-Paul BELMONDO ne correspond pas au rôle, ce qui évidemment passé le crime de lèse majesté que je fais à tous les amoureux du film, explique ma relative indifférence pour le film.

    En fait, le film est important car situé au milieu de sa filmographie il représente une rupture avec les films précédents de MELVILLE qui étaient parfois froids ou "documentaires". "Le doulos" est un polar, genre dans lequel va s'engouffrer le réalisateur qui va pouvoir donner corps à une de ses grandes ambitions: réaliser un polar français qui soit un hommage poussé au cinéma américain. Si la trame du film n'est pas exceptionnelle, le réalisateur va se surpasser pour soigner l'esthétique du film et en faire un modèle du style "Melville". Pour ce faire il va s'appuyer sur son directeur de la photo Nicolas HAYER qui livre une lumière très contrastée idéal pour le noir et blanc du film. D'autre part, le réalisateur possède son propre studio de tournage ce qui lui permet une très grande indépendance.

    L'amour du cinéaste pour le cinéma policier américain peut se constater à certains détails à commencer par la tenue vestimentaire des protagonistes : imperméables et chapeau mou durant toute la durée film pour BELMONDO et REGGIANI. Voitures américaines et détail moins visible: la reconstitution d'un bureau de commissariat identique au film américain "Les carrefours de la ville" de 1931.

    MELVILLE explore donc les méandres de l'univers des truands où la moralité et l'immoralité se côtoient avec des répercussions collatérales. Dès le générique du film on ressent également que le sujet sera dramatique, glauque. C'est un sentiment présent tout le long du film accentué par cette photographie très contrastée. Silien joué par BELMONDO est un personnage ambigu, dont on ne sait pas réellement s'il est un donneur, où s'il joue un jeu plus subtil. C'est une volonté délibérée du réalisateur de présenter un film stylisé et déconcertant pour le spectateur. Nous noterons une scène qui a pu choquer quelques ligues féministes où Silien ligote une jeune femme d'une manière quelque peu insistante. Le film développe plusieurs tics du réalisateur déjà rencontrées et qui seront développés dans ses films suivants: un phrasé un peu lent de la part des acteurs, la présence d'arrière plans très visibles lors des scènes situées dans des voitures et bien sûr le règlement de compte final entre les mauvais garçons. Le réalisateur ébauche aussi les rapports ambigus entre la police et les truands. Jean DESAILLY préfigure Paul MEURISSE dans "Le deuxième souffle" ou François PERIER dans "Le samouraï".

    La scène finale est totalement stylisée, avant de mourir, Silien se regarde dans une glace et se remet une mèche en place avant de rendre son dernier souffle. Une scène pas toujours heureuse, où BELMONDO n'est pas à sa place. Personnellement je trouve que BELMONDO  trop jeune pour le rôle une nouvelle fois. Ce n'est pas tant sa performance intrinsèque qui est remise en cause, mais bien la justesse de son rôle. De plus, le comédien habitué à semer la bonne humeur sur les tournages a subi une discipline de fer de la part de MELVILLE. L'acteur avoue s' être fortement ennuyé durant le tournage et cela se voir un peu à l'écran. Œuvre stylisé, à l'esthétique poussée, le film développe un petit sentiment d'ennui non dissipé par l'intrigue du film. Serge REGGIANI s'investit beaucoup, mais je ne l'apprécie pas. Mention très bien à Michel PICCOLI qui crève l'écran dans un rôle court mais fascinant. Grâce au film et aussi au "Mépris" il accèdera aux plus grands rôles dans les années futures.   

    Je vois "Le doulos" comme une ébauche qui annonce les fameux "deuxième souffle" et "Le samouraï". Dans le "deuxième souffle" MELVILLE trouve en Lino VENTURA un acteur parfait et à l'âge mûr en mesure de camper un truand qui a de la "bouteille". Dans "Le samouraï" aucun autre acteur que DELON peut porter aussi bien l'imperméable et le chapeau avec un style aussi incroyable. Il reste un film esthétiquement très réussi qui est très apprécié des critiques du monde entier qui en font une œuvre majeure du 7ème art.

    La critique est très positive et public parisien  réserve un très bon accueil au film qui reste largement en tête des exclusivités durant deux semaines. Il est certain que les succès obtenus par BELMONDO en 1962 attirent le public parisien qui se déplace en nombre. Le film totalise près de 500 000 entrées sur Paris ville. Pour la province le résultat est plus mitigé. Le faible coefficient Paris Province ne permet pas au film de rentrer dans le top de l'année 1963 où il demeure au-delà de la 40ème place, ce qui est un résultat mi figue-mi raisin. Mais pour les passionnés du 7ème art le film est un des meilleurs de l'année. Cet accueil mitigé n'empêche pas BELMONDO de tourner presque immédiatement le film suivant de Jean-Pierre MELVILLE, "L'ainé des Ferchaux". Le réalisateur va-t-il enfin toucher le très grand public ?                   

     

    Anecdote racontée par Jean-Pierre Melville :

    « Un jour, Georges de Beauregard, le producteur, est arrivé rue Jenner (où se trouvent les propres studios du réalisateur) dans tous ses états. Il était vitreux, verdâtre : ‘’Jean-Pierre, me confia-t-il, je suis foutu. Je vais sauter !’’ Il avait déjà signé tous les contrats avec Chabrol, Françoise Sagan, Michèle Morgan, Danièle Darrieux, Charles Denner, etc., pour faire ‘’Landru’’ que les Artistes Associés devaient produire, quand ils ont fait savoir qu’ils laissaient tomber le film. Sans les Artistes Associés, il était dans l’impossibilité d’honorer les contrats. Pour se tirer d’affaire, de Beauregard projetait d’aller vendre le film à Rome, mais pour pouvoir se débarrasser du film de Chabrol, il lui fallait une ‘’locomotive’’ : « Je sais que tu dois tourner en août prochain ‘’L’aîné des Ferchaux’’ avec Belmondo, me dit-il, mais je sais qu’il serait prêt à tourner immédiatement avec toi pour un autre film. Or, ne me dis pas que dans toute la ‘’Série noire’’ il n’y a pas un livre que tu aimerais tourner tout de suite… ». En effet, il y avait le livre de Pierre Lesou qui me plaisait particulièrement : ‘’Le Doulos’’. J’ai donné mon accord, mais à une seule condition : avoir Serge Reggiani pour le rôle de Maurice Faugel. Le lendemain de cet entretien, Georges de Beauregard me téléphonais de Rome pour me dire qu’il avait réglé l’affaire. Toutefois, Reggiani qui venait de lire le livre, voulait le rôle de Silien. C’est la spécialité de Reggiani de vouloir jouer le rôle qu’on ne lui propose pas. Si un jour on lui demandait de jouer Armand Duval, il serait capable de répondre qu’il veut jouer Marguerite Gauthier ! Pour jouer Silien, je tenais à Belmondo. Je trouvais amusant qu’il devienne indicateur après avoir été prêtre. J’envisageais donc de tout laisser tomber quand Reggiani s’est décidé à changer d’avis. Détail amusant : ce n’est qu’une fois ‘’Le Doulos’’ terminé que Belmondo s’est écrié très étonné, en se voyant à l’écran : ‘’Merde, alors ! L’indic c’est moi ?! ».

     

     

    Critiques :

    « J’ai voulu faire un film shakespearien, l’équivalent d’un western urbain nocturne, une tragédie, en même temps que quelque chose qui ressemble à un film américain ».  (Jean-Pierre MELVILLE)

     

    « Dans l’univers des truands, cher à son cœur, Melville fait entrer la tragédie et la fatalité. Réalisé de manière nerveuse et virile, construit comme un puzzle, son film déconcerte et pèche sans doute par excès de virtuosité. L’interprétation, quant à elle, est hors pair».  (‘’Télé 7 jours’’).

     

    « Dans l’argot du ‘’milieu’’, « le doulos » (ou porteur du ‘’doule’’ : chapeau) est un indicateur de police ; d’autre part, Melville a placé en sous-titre de son film ce fragment d’une phrase de Céline : « il faut choisir : mourir ou mentir ». Il s’agit donc d’un film policier avec des ambitions qui dépassent les limites habituelles du genre. Il y a dans ‘’Le doulos’’ de l’action, du suspense, de la rigueur et le goût de Melville pour l’étude psychologique. On peut regretter que l’intrigue soit assez embrouillée et obscure, en particulier sur le comportement des personnages. Silien est-il un indicateur, est-il sincère ou ment-il habilement ? L’interprétation est excellente».  (‘’Revue du cinéma, Image et Son’’ ).

     

    «… Serge Reggiani est proprement admirable. Il souffle la vedette à Jean-Paul Belmondo, solide, cruel, rusé».  (Marcel Martin, ‘’Cinéma 63, n°74’’ Mars 1963).

     

    «Au milieu d’une équipe d’acteurs au meilleur de leur forme, Belmondo est constamment remarquable. Le professionnalisme et le talent, c’est ça : pouvoir entrer dans un univers particulier, même si cet univers n’a rien a voir avec votre personnalité profonde».

     

    « Si l’auteur de films est en droit de jouer sur la duplicité, les faux-fuyants, les fourberies, au niveau de sa création, ce qui importe c’est qu’au niveau de la diffusion il sollicite, sans trucage, l’émotion du spectateur. C’est la méthode de Melville, sur le modèle américain. Méthode qui témoigne simplement d’une foi inébranlable en possibilités de son art».  (Claude Beylie, ‘’Cahiers du cinéma, n°141’’. Mars 1963 ).

     

     

    Merci à Didier NOISY pour l'anecdote et les critiques du film

     

     

     

    CATEGORIE

    RANG

    NOMBRE

    SALLES

    ENTREES FRANCE

    43

    1 477 619

     

    ENTREES PARIS BANLIEUE

     

    485 146

     

    EXCLUSIVITES

     

     

     

    1ère semaine

    1

    61 717

    4

    2ème semaine

    1

    57 762

    4

    3ème semaine

    1

    39 262

    4

    4ème semaine

    5

    29 296

    4

    QUARTIERS

     

     

     

    1ère semaine

    1

    73 560

    17

    Nombre de semaines Paris

     

    9

     

    Moyenne salles Paris 1ère sem

     

    15 429

     

    Cote du succès

     

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