• LE GUEPARD

     (Il gattopardo)

    28 MARS 1963 (IT)

    14 juin 1963

     

      GUEPARD

     

     

    • Réalisateur : Luchino Visconti
    • Scénario et dialogues : Suso Cecchi D'Amico, Pasquale Festa Campanile, Enrico Medioli, Massimo Franciosa et Luchino Visconti, d'après le roman de Giuseppe Tomasi di Lampedusa ; dialogues de la version française René Barjavel
    • Photographie : Giuseppe Rotunno
    • Musique : Nino Rota
    • Lieux de tournage : Ariccia (Latium) ; Ciminna (Sicile) ; Palerme ; Rome ; Mondello, une frazione de Palerme, (Sicile)
    • Production : Goffredo Lombardo ; Pietro Notarianni (exécutif)
    • Société de production : Titanus (Rome), Pathé Cinéma (Paris)
    • Société de distribution : Pathé Cinéma
    • Genre : drame historique
    • Durée : 205 minutes
    • Format : Couleurs (Technicolor) - 35 mm / Super Technirama 70 - 2,20:1 (2,35:1 étendu) - Son mono (Westrex Recording System)
    • Burt Lancaster (VO : Corrado Gaipa ; VF : Jean Martinelli) : le prince Fabrizio Corbera de Salina, un aristocrate sicilien vieillissant et lucide
    • Alain Delon (VO : Carlo Sabatini ; VF : lui-même) : Tancrède Falconeri, son neveu, un jeune homme charmant, plein d'allant et opportuniste, qui rejoint les Garibaldiens
    • Claudia Cardinale (VO : Solvejg D'Assunta ; VF : elle-même) : Angelica Sedara, la très jolie fille du maire, courtisée par Tancrède et amoureuse de lui
    • Paolo Stoppa (VF : Alfred Pasquali) : Don Calogero Sedara, son père, le maire de Donnafugata, un nouveau riche avide de pouvoir
    • Rina Morelli (VF : Jacqueline Ferrière) : la Princesse Maria Stella Salina, la prude épouse du prince
    • Romolo Valli (VF : Robert Marcy) : le Père Pirrone, chapelain du prince, un jésuite d'origine populaire, soucieux avant tout des intérêts du christianisme
    • Mario Girotti (futur « Terence Hill ») (VO : Pino Colizzi) : le Comte Cavriaghi, un lieutenant ami de Tancrède, qui courtise en vain Concetta
    • Pierre Clémenti (VO : Pino Colizzi ; VF : lui-même) : Francesco Paolo Salina, le fils du prince et de la princesse
    • Ottavia Piccolo : Caterina
    • Serge Reggiani (VO : Lando Buzzanca ; VF : lui-même) : Don Francisco Ciccio Tumeo, l'organiste de Donnafugata, un homme du peuple fidèle aux Bourbons qui lui ont payé ses études
    • Giuliano Gemma : général garibaldien
    • Lucilla Morlacchi : Concetta Salina, la fille du prince et de la princesse, amoureuse de Tancrède qui la rejette, et qui repousse à son tour Cavriaghi

    Au moment où Garibaldi débarque en Sicile, Tancrède, le neveu préféré du prince de Salina, rejoint les troupes révolutionnaires. Après la victoire de Garibaldi, Tancrède, héros de la révolution, obtient un laisser-passer pour permettre à son oncle de s'installer avec sa famille dans sa maison de campagne à Donnafugato. Pendant ce déplacement, Tancrède fait la cour, pour passer le temps, à sa cousine Concetta. Celle-ci charge le chapelain, conseiller spirituel de toute la famille, d'interroger son père quant à la possibilité d'un mariage avec Tancrède ; mais le prince n'est pas d'accord. Bien plus, Tancrède est épris d'Angelica Sedara, fille du maire de Donnafugata. Acceptant malgré lui les circonstances, le prince vote, aux élections, en faveur d'un royaume unifié d'Italie, et contre les princes de Bourbon. Tancrède rejoint son régiment et écrit à son oncle de demander la main d'Angelica. Le prince a un entretien avec Calogero Sedara, père de la jeune fille, un gros bourgeois dont on dit qu'il est aussi riche que lui. Peu après, Tancrède revient, et passe quelques jours en compagnie de sa bien-aimée, qu'il épousera bientôt. La dernière scène du film est celle du grand bal, offert par le prince à toute l'aristocratie sicilienne, pour les débuts d'Angelica dans le monde. Après le bal, le prince, sentant le poids de la vieillesse et de la mort, prend congé. Il entend dire que quatre déserteurs de l'armée de Victor-Emmanuel, qui ont cherché à s'unir à Garibaldi, seront fusillés. Il attend l'aube en se promenant au bord de la mer. Quatre coups de feu déchirent le silence. puis plus rien. Lentement le prince de Salina se dirige vers l'endroit où les hommes ont été fusillés : l'aristocratie mourante vient assister à la mort de l'idéal de la liberté.

     *****************************************************

    Entre deux tournages, Luchino VISCONTI apprécie de mettre en scène des pièces de théâtre. Avec Alain DELON il a développé une profonde affinité. L'acteur apprécie cet esthète raffiné et fort cultivé. Il apprend beaucoup avec lui. C'est pour cette raison que VISCONTI monte une pièce de John FORD "Dommage qu'elle soit une putain" avec Alain DELON et surtout Romy SCHNEIDER. Pour Romy c'est un tournant, c'est la première fois qu'elle se présente devant le public parisien qu'elle doit affronter avec son accent germanique. Elle veut démontrer qu'elle a changé depuis "Sissi" quitte à choquer les spectateurs. C'est également une nouvelle expérience pour DELON. La pièce est accueillie d'une façon très mitigée. Romy donne beaucoup, trop peut être, et DELON doit humblement admettre, que le théâtre c'est un art très difficile et qu'il s'est peut être planté. Du reste, l'expérience tournera court. Qu'importe, le réalisateur va proposer à DELON de tourner dans sa nouvelle fresque, son oeuvre sans doute la plus ambitieuse, "Le Guépard". Il interprètera le rôle de Tancredi, le neveu du Prince de Salina qui correspond à son âge. A ses cotés, la jeune Claudia CARDINALE, folle de joie à l'idée de retrouver celui qui restera son cinéaste favori. L'actrice, bien conseillée par son mari producteur, accède à aux plus grandes productions italiennes. De plus, elle a rencontré le grand succès en France avec "Cartouche", sa deuxième collaboration avec BELMONDO, c'est un point positif pour l'exploitation française, qui plus est avec Alain DELON comme locomotive. Nous noterons également un petit rôle pour Serge REGGIANI qui parvient à se faufiler dans cette superproduction.

    Les plus observateurs retrouveront la présence de Guilano GEMMA, d'Ottavia PICCOLO et d'une apparition de Terence Hill sous son vrai nom: Mario GIROTTI (voir photos)

    Le réalisateur va s'atteler à son projet démesuré. Ce pan de l'histoire italienne reste relativement méconnue des français. Avant 1860, l'Italie était un ensemble de provinces dont chacune était  indépendante et régie par de grandes familles. La réunification de ces états fait suite à un mouvement révolutionnaire européen. L'Italie verra un bouleversement de sa structure sociale et la fin de la haute aristocratie dirigeante italienne. Cette période verra également la guerre de l'Italie contre l'Autriche, ce qui arrange bien la France qui aidera énormément l'Italie à s'unifier, gagnant au passage la Savoie et Nice. L'unification sera définitive en 1870. Cette période d'unification s'appelle le Risorgimento. VISCONTI va conter l'histoire du Prince Salina, Prince de Sicile qui va connaître les tourments de cette révolution qui verra la Sicile réunie au royaume du Piémont. Le film décrit le déclin politique de ce grand homme, et sa vision des évènements.

    Afin de monter ce projet qui fut nommé le "Autant en emporte le vent" italien, les producteurs qui désirent en faire un succès international y compris aux USA ont besoin de réunir le budget de 3 milliards de lire. Ils sollicitent la FOX pour une aide financière de 3 millions de dollars. La FOX  qui vient de produire "Cleopatre" et "Le jour le plus long" est interessée par cette fresque, mais souhaite une vedette internationale pour jouer Salina. VISCONTI cherche donc sa perle rare  et songe en premier lieu à Laurence OLIVIER, qui refuse. Goffredo LOMBARDO propose Burt LANCASTER a VISCONTI qui n'est pas d'accord du tout pour engager un "cow boy". La vision de "Jugement à Nuremberg" modère ses propos, et il accepte de rencontrer Burt LANCASTER. En fait, la FOX est très active pour qu'il accepte de l'engager. Au final VISCONTI est surpris de trouver un acteur autodidacte passionné d'histoire et de cinéma européen. LANCASTER veut tourner avec VISCONTI et être associé à un réalisateur de sa classe.

    Le tournage peut débuter. Il sera long et le réalisateur se montre lent et minutieux. Entre les décors fastueuxet les scènes d'intérieur compliquées à réaliser, le moindre détail vestimentaire doit être raffiné et rigoureusement exact. Jusqu'à la vaisselle et les boutons de manchette. Le film va être luxueux. 

    Certes, on pourrait dire que VISCONTI a fait des concessions aux canons hollywoodiens. Mais le réalisateur possède un solide script qui fait la part belle à une multitude de scènes intimistes qui vont suggérer la fuite du temps, l'agonie d'une époque, une aristocratie qui se cramponne à ses fêtes et à ses coutumes, les roturiers qui ont les dents longues et qui luttent pour obtenir le pouvoir. 

    Dans son introduction, VISCONTI nous montre les fastes de cette grande bourgeoisie sicilienne. Les propriétés sont immenses, magnifiques. La religion est omniprésente dans le film, et d'ailleurs le film s'ouvre sur une scène de prière collective. L'ambiance, hors du temps, est troublée par la menace de la guerre civile. Le film penche ensuite vers une reconstution des scènes de batailles violentes, où les civils sont fusillés par l'armée devant leurs femmes et enfants. Une scène barbare qui montre que cette révolution a été fort sanglante. Pendant ce temps les réglements de comptes ont lieu, témoins les dialogues entre le Prince et son curé, les moqueries de l'aristocratie envers la façon de se vêtir des nouveaux riches... Le Prince devra faire preuve de diplomatie pour résister à l'arriviste Tancrède. La description des évènements est subtile, et VISCONTI se régale dans les petits détails et les dialogues qui montrent les antagonismes entre un ancien monde et le nouveau qui va tout renverser petit à petit. Le réalisateur peut compter sur la présence remarquable de Burt LANCASTER un des plus beaux rôles de sa vie. Bien que Salina soit un homme fini, il demeure superbe, royal, séducteur mais aussi parfois violent. Il ne montre jamais en public sa tristesse, ses doutes, et son désarroi devant ce monde, son monde, qui change.

    VISCONTI dira de son acteur : "Le prince lui-même était un personnage très complexe, parfois sévère, parfois rude, despotique, parfois romantique, bon et compréhensif, parfois même stupide, et par dessus tout, mystérieux. Burt est tout cela aussi, je pense parfois qu'il est l'individu le plus parfaitement mystérieux que j'ai rencontré".

    LANCASTER vampirise tellement le film, qu'il reste paradoxalement peu de place pour les autres personnages pourtant nombreux. Le jeu de DELON est plus conventionnel que dans "Rocco", il y apparait plus sûr, plus académique. Reste qu'il apporte sa fougue et sa jeunesse au film. Son entente avec Claudia CARDINALE est palpable. L'actrice donne tout pour un réalisateur qu'elle adore. Pendant que le film est au montage, DELON tourne rapidement "Mélodie en sous-sol" et devient très "bankable". VISCONTI lui propose de tourner dans son film suivant, "Sandra" et de reconstituer le couple qu'il forme avec Claudia CARDINALE. Seulement le film traite de relations incestueuses entre un frère et une soeur, et la pièce de théâtre qu'il a joué avec VISCONTI était déja très ambigüe. DELON n'a plus besoin de son mentor. Il refuse et sera remplacé par Jean SOREL. Et puis DELON et LANCASTER se sont très bien entendus sur le tournage. DELON admire profondément l'acteur et déclare qu'il est le plus grand d'Hollywood. Sans doute le fait de côtoyer une des plus grandes stars du monde va lui donner l'idée de tenter sa chance aux USA. Ce qu'il fera. Les deux acteurs se retrouveront avec plaisir dans "Scorpio" , 10 ans plus tard. 

    Même si la prestation de DELON (nommé dans la catégorie meilleur espoir en 1964 aux Golden Globes)  et de Claudia CARDINALE est saluée, c'est bien Burt LANCASTER qui remporte tous les suffrages. Le film gagne la prestigieuse Palme d'Or au festival de Cannes 1963 et triomphe en Italie ou il rapporte près de 2.5 milliards de lires, c'est tout simplement le plus grand succès de l'année. Aux USA malheureusement, le public est moins sensible à cette fresque italienne et le film est boudé, malgré une version remontée à la hâte et la présence de Burt LANCASTER.

    En France, l'accueil se fait en douceur; A Paris, le film de trois heures ne sort que dans une seule salle, l'Avenue, et attire 11 000 spectateurs la première semaine. Le tarif est luxueux, il faut débourser pas moins de 13.90 Francs pour avoir l'honneur d'assister à la projection, ce qui garantit une coquette recette, mais n'est pas fait pour attirer une meute de spectateur qui doit payer sa place tarif double, voire triple. Malgré une érosion constante mais lente, le film va parvenir à rester plus de 40 semaines à l'affiche, avant de voir son parc de salles parisiennes passer à 3, ce qui va relancer son exploitation, mais jamais vers les sommets. Cependant cette longue exploitation va lui permettre d'engranger un nombre correct de spectateurs, mais surtout, une belle recette. Cependant, contrairement à "Rocco", le film grâce à sa réputation légendaire, va connaître deux belles rééditions estivales. La première en 1971, avec près de 250 000 entrées sur Paris Banlieue et la seconde en 1980 avec encore plus de 100 000 spectateurs. Le film n'étant pas passé à la télévision, les spectateurs pouvaient encore profiter de la réédition du patrimoine mondial durant les étés où les studios balancaient leurs fonds de tiroirs ou séries B. Aujourd'hui, le film cumule plus de 3.5 millions de spectateurs, un très beau score. Avec plus de 1.2 millions de spectateurs sur Paris Banlieue cela reste un des plus grands succès de DELON et LANCASTER, mais c'est un succès très parisien.

    En Italie le film est un triomphe et devient le numéro un de l'année 1963. Il totalise plus de 11 millions d'entrées à ce jour. C'est le pic de la carrière de VISCONTI qui ne retrouvera plus pareil succès.

    Si "Le guépard" reste le film de VISCONTI le plus académique, il n'en demeure pas moins comme le fleuron le plus précieux d'une production italienne qui connaîtra moins de fastes dans les années suivantes. VISCONTI se tournera vers d'autres films, d'autres genres, mais va demeurer le réalisateur italien qui aura le plus de succès en France. Il retrouvera même Burt LANCASTER dans un de ses derniers films. L'acteur va retourner dans des productions plus lucratives aux USA, avec son réalisateur fétiche, John FRANKENHEIMER.       

     

    CATEGORIE

    RANG

    NOMBRE

    SALLES

    ENTREES FRANCE

     

    3 649 498

     

    ENTREES PARIS

     

    948 560

     

    ENTREES PARIS 1963
    (source Film Français)

     

    379 102

     

    ENTREES PARIS BANLIEUE

     

    1 236 142 

     

    exclusivité parisenne

     

     

     

    1ère semaine

    12

    11 000

    1

    2ème semaine

    10

    10 400

     

    3ème semaine

    16

    9 900

     

    4ème semaine

    15

    8 700

     

    5ème semaine

    14

    8 100

     

    6ème semaine

    14

    7 068

     

    Exploitation 1971 Paris Banlieue

     

    248 616

     

    1ère semaine

     

    31 090

    6

    (source CNC)

     

     

     

    Exploitation 1980 Paris Banlieue

     

    120 875

    9

    1ère semaine

     

    26 530

     

    Cote du succès

     

    * * * *

     

     

     BELLE BANDE ANNONCE VF D'EPOQUE

     

     

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