AU DELA DES GRILLES - JEAN GABIN BOX OFFICE 1949

Ça n'est pas parce qu'il est arrivé à bon port que Pierre débarque à Gênes du cargo " Flora " : c'est, plus prosaïquement, parce qu'il souffre d'une terrible rage de dents. En réalité, Pierre serait volontiers resté à bord, à l'abri de la police qui le cherche pour l'assassinat, en France, d'une femme qui le trompait. Une petite fille, Cecchina, conduit le fugitif chez un dentiste à la porte duquel il se fait voler son portefeuille. Désemparé, Pierre se réfugie chez Marta, la mère de la fillette, serveuse dans un restaurant et dont le mari, Manfredini, vient périodiquement la relancer - ils sont séparés - et réclamer la garde de Cecchina. C'est en prenant la défense de Marta que Pierre se rend compte qu'il éprouve pour la jeune femme plus que de la sympathie. Aussi retrouve-t-il spontanément le chemin du domicile de Marta lorsqu'il aura, en vain, tenté de franchir les grilles qui interdisent l'entrée du port. Ce sentiment naissant entre Pierre et sa mère rend jalouse Cecchina qui aide donc son " rival " à regagner le " Flora " mais, contre son attente, Pierre revient avec sa valise, décidé à rester auprès de Marta. Le voleur qui a dépouillé Pierre de son portefeuille a été arrêté et la police retrouve aisément la trace du fugitif. Cecchina tente de l'avertir en couvrant les murs d'inscriptions qu'il ne devrait pas manquer de lire à son retour de la plage où il a passé la nuit avec Marta. Mais Pierre ne voit rien et se fait cueillir par la police.

**************

1948 sera une année importante pour Jean GABIN. Après l’échec de "Miroir" qui est autant artistique que commercial, il se sépare de son agent et il choisit André Bernheim chaudement recommandé par  Marlène DIETRICH. Ce dernier lui conseille de monter sur scène pour jouer "La soif" d'Henry BERNSTEIN et remplacer Bernard BLIER puis il négocie le contrat pour le nouveau film de René CLEMENT "Au delà des grilles" dont le tournage aura lieu en Italie. Le réalisateur dont le film précédent "Les maudits" a été un grand succès poursuit dans sa veine d'un cinéaste éclectique. Tourner avec GABIN est l'occasion de lui proposer un rôle familier à l'acteur, celui d'un personnage à la "Pépé le Moko". Le tournage se fait à Gênes en décors naturel dans la mesure du possible. Le réalisateur utilise des caméras cachées pour donner plus d'authenticité au film. Difficile de ne pas penser au néo-réalisme italien quand on découvre le film. Jean GABIN interprète Pierre, un homme traqué en France pour le meurtre de sa femme et qui doit faire une escale forcée à Gênes pour se faire arracher une dent, se fait voler son argent et doit suivre une jeune fille qui le conduira vers sa mère. Une idylle naitra entre les deux, mais est-elle viable, alors que la police italienne est sur ses traces ? Le scénario est très simple et le film tourne vite vers la romance finale, mais dans ce film c'est sans doute la forme qui compte plus que le fond. René CLEMENT explore cette Italie d'après guerre qui porte encore tous les stigmates de la destructrice seconde guerre mondiale. Une vision du port de Gênes que n'aurait pas renié un Roberto ROSSELLINI. La pauvreté à gagné la population, les billets de banque sont grands comme des tablettes de chocolat et ne valent plus grand chose. Dans cette ville harassée, Pierre va trouver le réconfort  avec deux femmes : une d’âge mur Marta interprétée par Isa MIRANDA et une en devenir Cecchina, la fille de Marta.

Fatalement l’idylle entre Pierre et Marta va être gâchée par la jalousie de Cecchina.

Des rapports ambigus qui donnent du sel à une romance assez convenue entre les deux adultes. René CLEMENT propose un film très réussi visuellement prouvant une nouvelle fois son talent et parvient à distiller un sentiment confus quant au comportement de l’adolescente envers les adultes. Jean GABIN propose palette habituelle à la fois mi prolo, mi séducteur et fait preuve d’une grande présence. Et c’est pourtant sa partenaire Isa MIRANDA qui remporte le prix d’interprétation au festival de Cannes et le film remporte le grand prix de la mise en scène au même festival. Encore mieux, le film obtient l’Oscar du meilleur film étranger, rien que ça. Mine de rien Jean GABIN figure dans un des meilleurs films de l’année, ce qui est à rappeler, bien loin de cette idée de période noire qui lui colle à la peau. Bien sûr, GABIN n’obtient pas de prix ce qui peux peut être le miner un peu.

Le film est un succès indéniable à la fois critique et commercial. Avec plus de deux millions d’entrées dont plus de 500 000 spectateurs à Paris, c’est un succès indéniable pour ce film dramatique. De plus la pièce de théâtre « La soif » triomphe, ce qui renforce l’image de GABIN et l’acteur fait connaissance de sa future femme Dominique.  

« Au-delà des grilles » reste un très bon film à redécouvrir.                       

.